L’Agence chilienne de qualité de l’éducation travaille avec l’ensemble du système éducatif, « en fournissant des évaluations, conseils et informations afin d’obtenir une éducation globale de qualité ». Le Blog de la plateforme présente un entretien avec le secrétaire général de l’Agence afin d’en apprendre plus sur cette organisation.
Carlos Henríquez Calderón est le secrétaire général de l’Agence chilienne de qualité de l’éducation, un organisme du service public qui a pour objectif l’évaluation et l’orientation du système éducatif, afin de garantir un haut niveau de qualité et d’égalité des chances en éducation. Dans un entretien avec Barbara Santibáñez, il répond à quelques questions au sujet du travail de l’agence.
Qu’est-ce que l’Agence de qualité de l’éducation ? Dans quel but a-t-elle été créée ?
L’Agence de qualité de l’éducation a été créée dans le contexte des manifestations étudiantes et lycéennes de 2006 et de la création d’une commission chargée de mener le débat sur la qualité de l’éducation au Chili. Une des premières conclusions de la commission a été de constater l’existence de plusieurs points de vue sur ce sujet et qu’une certaine institutionnalisation est nécessaire pour pouvoir avancer. Cette institutionnalisation doit générer un changement paradigmatique du système de l’assurance de qualité et met un plus grand accent sur les forces, faiblesses et contextes des établissements scolaires. Nous sommes tout juste en train d’assimiler ceci et c’est le principal défi : les écoles ont besoin d’être au centre afin de pouvoir atteindre la qualité.
Comment fonctionne l’Agence, et quelles sont ses attributions par rapport au ministère de l’Éducation?
En tant qu’agence nous avons trois fonctions : tout d’abord, l’évaluation des résultats d’apprentissage avec un regard plus large sur la qualité, en utilisant traditionnellement les évaluations SIMCE mais aussi de nouveaux outils, les indicateurs de développement personnel et social. Ensuite, nous fournissons des données aux différents partenaires du système éducatif, afin qu’ils puissent s’améliorer en termes de qualité. Enfin, nous donnons des conseils à la communauté éducative, en nous assurant que les évaluations soient pertinentes et qu’elles puissent appuyer tout le processus. Plus largement, nous faisons en sorte que l’évaluation soit vue comme une opportunité et comme un point central pour de meilleurs apprentissages pour tout le système scolaire, et en particulier pour les décideurs, les enseignants et les responsables administratifs.
Quels sont les liens de l’Agence avec les différents secteurs de l’éducation?
Au départ, nous étions vus comme une entité dont le but était de sanctionner et de trouver des coupables. Mais nous avons ensuite lancé nos visites d’évaluations et de conseil, pendant lesquelles une équipe passe trois jours dans une école, travaillant avec l’équipe, analysant sa stratégie pédagogique et cherchant à identifier ses points forts et faibles. Il y a un travail de professionnalisation nécessaire, mais tous nos efforts, bien que conséquents, ont d’ores et déjà produit des résultats. Nous sommes une agence jeune ; nous ne prétendons pas être la solution mais plutôt un soutien. Nous cherchons à provoquer le dialogue au sein des écoles et de tout le système éducatif afin d’obtenir une plus grande qualité. Ainsi, une agence comme la nôtre peut permettre un dialogue, poser certaines questions, tenter de collaborer avec d’autres personnes et groupes, etc.
Une des nouvelles initiatives de l’Agence est « Dialogues pour l’éducation ». Quel en est le principal objectif ? À qui s’adresse-t-elle ?
Les Dialogues ont pour but l’établissement d’un espace de discussion sur la question de la qualité de l’éducation avec différents acteurs. Nous disposons d’un cadre donné par la loi, mais comment est-ce que chaque communauté scolaire peut s’approprier son propre processus ? Comment peuvent-elles s’approprier le débat sur la qualité de l’éducation ? Nous avons essayé de créer un espace de dialogue dont le but est, plutôt que de fournir des réponses, de poser des questions qui vont nous permettre de découvrir ensemble les différents points de vue et de trouver ensemble des points de convergence.
Les « Dialogues » ont débuté en 2015 et nous les avons déployés plus largement cette année. Nous l’avons fait par régions (des macro-zones), par le biais des réseaux sociaux ou d’enquêtes, etc. Le but est de permettre à tous de donner leur opinion, pour que d’ici la fin de l’année nous puissions systématiser l’information. Nous aimerions voir une plus grande participation des secteurs ruraux et des petites villes. Nous espérons produire un rapport vers le mois de septembre qui alimentera le débat.
Quels sont les grands succès de l’Agence?
Nous avons réussi de nombreuses choses au sein de nos différents domaines de compétence. Premièrement, l’évaluation d’un grand nombre d’élèves en un temps très court (8500 établissements dans tout le Chili et plus de 1,08 million d’élèves). En plus de l’évaluation des réussites linguistiques et mathématiques, nous analysons ces indicateurs de développement personnel et social, qui nous permettent de donner un signal très clair, ce qui est un succès conséquent. Deuxièmement, en ce qui concerne notre fonction de conseil, nous avons commencé avec une vingtaine de visites. En 2015, nous avons atteint le chiffre de 505 visites. Ceci représente un énorme effort en termes de ressources financières et humaines. Enfin, il y a l’information que nous fournissons aux parents, aux tuteurs, enseignants et aux écoles au travers de formations, séminaires et dialogues avec les communautés. Nous avons connu beaucoup de succès, non seulement en termes quantitatifs, mais également qualitatifs, principalement grâce à nos formations et conseils. À titre d’exemple, l’année dernière nous avons formé 3400 directeurs d’établissements, ce qui représente presque un tiers du système scolaire.
Quels ont été les principaux défis?
Le premier défi a été de construire une structure, ce qui ne s’est pas juste fait à travers une simple loi. Ensuite, de réussir à faire bouger l’opinion selon laquelle les évaluations ne peuvent être que punitives, vers une appréciation de l’importance d’identifier où nous en sommes, pour pouvoir nous améliorer et prendre nos responsabilités. Un troisième défi a été d’augmenter nos instruments et outils, afin de ne pas utiliser uniquement des méthodes d’évaluation standardisées.
Que peuvent apprendre d’autres pays de l’expérience chilienne?
En ce qui concerne les leçons que nous avons apprises, ce qui est important ce n’est pas seulement la création de ce programme mais également sa mise en œuvre. Par exemple, notre système de contrôle de qualité a été créé en 2011, mais sa concrétisation ne s’est faite qu’entre 2014 et 2015. La création d’un cadre légal ne suffit pas. Il faut de l’effort, du dévouement, des capacités, du travail en équipe et de nombreux autres éléments afin d’assurer la mise en œuvre et de réussir à faire une différence. La deuxième leçon : l’importance et la nécessité d’être capable de se rencontrer et de travailler ensemble. Ceci ne peut pas dépendre uniquement d’un débat technique. Il faut avoir une conversation avec les communautés éducatives, les parents, les tuteurs, les enseignants, afin que tous placent les intérêts des enfants et des jeunes par dessus les intérêts corporatifs. La troisième leçon est que chaque pays doit tailler son programme sur mesure. Le Chili a fait des progrès, et il est impératif de pouvoir apprécier ce qui a été atteint à sa juste mesure et de relativiser les défis.